Un carnaval...sans animaux!

Les circonstances étaient exceptionnelles. Je me réjouissais à l'idée d'être accompagné par deux de mes petits enfants à la Tohu pour le Carnaval des Animaux, un spectacle réputé pour enfants! Outre le plaisir de les voir apprécier un spectacle de cirque, je nourrissais aussi le projet de les faire participer à la rédaction du compte-rendu que je m'impose après chaque séance à la Tohu.

Hélas! J'aurais dû me souvenir de mon expérience de parent. Parfois, je me trompais sur les goûts et les désirs  de mes enfants. On préparait une sortie ou une fête qui tournait court faute d'en avoir parlé avec les enfants qui avaient d'autres aspirations. 

C'est exactement ce qui s'est passé à l'issue du spectacle, alors que je m'apprêtais à recueillir les fruits de mon invitation en questionnant mes petits-enfants sur leurs impressions.

Grand-papa: Comment as-tu trouvé le spectacle?
Petit-fils aîné (10 ans): Moyen! 
C'était lapidaire, tranchant, définitif. Il n'y avait pas à revenir là-dessus, c'était moyen. Il n'avait donc pas aimé.

Grand-papa (insistant): Mais cherche bien, il y avait certainement des choses positives. Si tu devais recommander ce spectacle à un copain, quel argument trouverais-tu?

Petit-fils aîné: Je ne le recommanderais pas!
Au moins, c'était clair. Après discussion dans les jours qui suivirent, il admit avoir apprécié les acrobates (les adultes, mais pas les jeunes Montréalais). Par contre, il avait détesté les projections qui, selon lui, n'avaient aucun rapport avec l'action sur scène.

Échaudé par les réponses de l'aîné, je me tournais vers le cadet à la sortie du spectacle.
Grand-papa (plein d'espoir): Et toi?
Petit-fils cadet (6 ans): J'ai pas aimé ça...il y avait pas d'animaux!

Grand-papa est obligé de reconnaître qu'il est logique le cadet. On l'emmène voir un Carnaval des Animaux sans le prévenir qu'il n'y aura pas d'animaux. Précisons qu'il n.a jamais vu de cirque traditionnel. Admettons cependant que pour la majorité des enfants, le mot cirque est généralement associé aux animaux. La littérature enfantine en fait foi. Questionné par la suite, il déclara avoir aimé la séquence des balançoires, dont personnellement, je ne me souviens plus. Pas plus que son frère, il ne semble avoir aimé les jeunes acrobates montréalais incorporés dans la troupe de Circa
.

Tout ceci demande réflexion:
Je ne pense pas que mes petits-enfants soient différents des autres petits Montréalais de leur âge. Cette génération se distingue par son franc parler. Ce ne sont pas eux qui vont travestir leurs sentiments ou leur opinion pour faire plaisir à grand-papa. Je m'interroge donc. Si la compagnie Circa a créé un spectacle pour enfants, pourquoi est-ce que les meilleures critiques viennent des adultes et non de la clientèle ciblée. Apparemment, les créateurs de ce spectacle avaient des idées préconçues sur ce qui est censé plaire aux enfants. Ont-ils testés les effets lors de sa conception? Je ne le penserais pas.
L'idée était séduisante. On prend une oeuvre musicale fort célèbre, le Carnaval des Animaux de Camille Saint Saëns et on la transforme en spectacle visuel et acrobatique. Ça devrait faire un succès! Et bien non, ça ne marche pas. On ne peut installer des enfants devant un tel spectacle sans un minimum de préparation. On aurait pu au moins s'attendre à un narrateur comme le Cirque du Soleil  vient de le faire pour Toruk, sa nouvelle création. Mais peut-être, est-ce une barrière de langue. Y en avait-il un lors de sa création en Australie? Je ne sais.   

Grand-papa et ses petits-enfants à la Tohu

J'en arrive à la conclusion que la pièce musicale de Saint Saëns se suffit à elle-même. Très pertinente, elle ne nécessite aucune adaptation pour être mieux comprise par les enfants. Un atelier musical sur ce thème aurait été le bienvenue favorisant leurs connaissances musicales et surtout leur imagination.

En terminant, je dois admettre que certains aspects de ce spectacle m'ont plu. J'ai aimé les projections qui accompagnaient ce carnaval. Très poétiques, elles constituaient un lien magique avec le déroulement de l'action sur scène. Les pyramides simulant les animaux m'ont paru parfois fort ingénieuses. J'ai apprécié la présence des jeunes acrobates montréalais. Leur apport m'a paru très rafraîchissant. J'aurais aimé donc...du moins partiellement, mais le problème, c'est que je ne suis plus un enfant...depuis longtemps, déjà.

À noter que nous avons déjà consacré deux billets à ce spectacle (les 1er et 19 décembre) et qu'il en a été fait mention dans l'article sur Toruk, le 30 décembre. 


Claude Bordez