Il est certain que le jour de la première (21 juillet) le public était divisé. À l’issue de la représentation, alors qu’une partie de l’auditoire se levait et ovationnait les artistes, une autre restait assise, se contentant d’applaudir poliment. Ces derniers partageaient probablement l’opinion d’un critique montréalais bien connu qui le lendemain émettait, en substance, le commentaire suivant : « On nous annonçait un spectacle coup de poing, effectivement, c’était assommant! »
L'Usine C cache une belle salle de spectacle, rue Lalonde, Montréal (Photo Alonzocirk)
En fait, ce spectacle, cette pièce devrais-je dire, était beaucoup plus près du théâtre que du cirque. Pourtant le décor était prometteur, un salon des années 50 qui aurait pu être celui d’une comédie de boulevard avec, à l’avant-scène, une rampe pour planche à roulettes surmontée d’un cadre aérien.
La pièce? Non, ce n’était pas une comédie, mais bien un drame avec trois personnages, un triangle amoureux où un mâle, exerce sa domination au détriment de sa compagne et de son innocent rival.
Et le cadre aérien? Il ne m’a semblé qu’accessoire dans cette pièce dramatique. Il devenait un "champ de bataille" lorsque l’affreux macho (le porteur) voulait dominer sa partenaire (la voltigeuse) et assouvir ses instincts. Elle se rebellait mais finissait par se soumettre. Et le numéro, me direz-vous? Car, au fond, c’est ce qui nous intéresse. Sur le plan acrobatique, il m’a parut ordinaire et répétitif. C’est vrai qu’à Montréal, nous sommes gâtés et de ce fait très exigeants à cause de l’excellence de notre école nationale (ENC). Sur un autre plan, le spectateur devenait voyeur, tant les positions entre le porteur et la voltigeuse évoquaient le Kâmasûtra.
Le duo aérien dans Sway (Photo Les Mains Sales).
La rampe pour planches à roulettes? Elle m’a paru superflue et mal exploitée. Dommage, la combinaison insolite avec le cadre aérien aurait pu conduire à des exercices inédits et spectaculaires. Pas de planches ni de patins à roulettes, on marchait ou on courait pour faire l’ascension de la rampe. On réussissait ou on glissait et on recommençait encore et encore, véritable parodie du mythe de Sisyphe. De la tradition indienne, on était passé à la mythologie grecque.
Le troisième protagoniste, quant à lui, ignorait les hauteurs. Comédien, chanteur et musicien, nullement acrobate, il restait gentiment sur le tapis du salon.
À mon avis, une telle pièce ne mérite pas de s’intituler spectacle de cirque, fut-il contemporain. Un seul numéro ne fait pas un spectacle de cirque.
Mais alors, qu’applaudissaient donc les spectateurs enthousiastes du 21 juillet?
Sway a été présenté à l’Usine C du 21 au 23 juillet par la troupe belge Les Mains Sales dans le cadre du Premier Festival de Cirque de Montréal.
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